lundi 26 septembre 2016

"NOQTURNL" de John Connell et Florence To

4DSOUND est une technologie créée en 2007 par Paul Oomen et hébergée au Spatial Sound Institute de Budapest.

(source : François Frémeau, licence CC BY-SA 4.0)
Situé dans une ancienne distillerie, le lieu offre l'occasion de nombreuses résidences d'artistes. La salle possède un caractère graphique particulier avec une charpente ancienne en bois et un sol en grille métallique laissant apercevoir un vaste espace sous nos pieds. C'est dans cet espace que sont positionnées des enceintes (sous nos pieds, au-dessus de nos têtes et au plafond) permettant au son de se circuler dans l'espace en trois dimensions tout autour du public. 

(source : François Frémeau, licence CC BY-SA 4.0)
Le principe de la pièce "NOQTURNL" est d'accueillir un public invité à expérimenter un état d'hypnose à mi-chemin entre le sommeil et l'état de conscience. Chacun doit s'allonger dans la pièce relativement obscure et remplie de fumée. Sont alors projetés des sons et des lumières. L'oeuvre est réussie dans le sens où on est tour à tour tenté de se laisser aller au sommeil (la version proposée à Budapest est une version réduite de la pièce qui dure habituellement sept heures) et réveillé d'une manière abrupte par un son ou une lumière. 


NOQTURNL from Florence To on Vimeo.

C'est à la fois ce qui est souhaité par les auteurs, l'artiste visuelle Florence To et le designer sonore John Connell, mais également ce qui apporte une certaine frustration lorsqu'on vit la pièce de l'intérieur. Techniquement, il y a de forte chances pour qu'on s'endorme tout à fait, manquant une partie de la pièce. On se réveille parfois par intermittence pour découvrir un nouvel éclairage qui habille l'espace et on ne peut pourtant pas s'empêcher de se rendormir. Autant dire qu'il est très difficile de suivre la pièce avec un état total de conscience, et c'est ce qui est souhaité par les créateurs de l'oeuvre. C'est donc un pari réussi qui interroge la perception que l'on a d'une oeuvre d'art qui est, de toute manière, toujours tronquée, incomplète, interrompue. 

Georg SCHROLL, Noqturnl rehearsals at 4DSOUND Budapest, 2015
(source : licence CC BY-NC-SA 2.0 via Flickr)
Une interview de Florence To sur Creative Application Network explique cet état de semi-conscience et semi-sommeil souhaité par les auteurs et ce qu'il implique comme émotions chez le public, mais aussi chez l'artiste. Une invitation au sommeil assez rare dans l'art occidental et qui est la bienvenue. 

dimanche 18 septembre 2016

"VITR-EAU" d'Agathon

L'art contemporain se cache parfois au détour d'un immeuble. Ainsi, la piscine Château-Landon dans le 10e arrondissement de Paris abrite une fresque de l'artiste Agathon (qui a obtenu une certaine notoriété après avoir illustré le Journal d'hirondelle d'Amélie Nothomb. 

Agathon, VIT-REAU, 2015
(source : François Frémeau, 
licence CC BY-SA 4.0)

Agathon, VIT-REAU, 2015
(source : François Frémeau, 
licence CC BY-SA 4.0)
Constitué de 5 tableaux aux couleurs évocatrices des fonds marins, les couleurs vives et les motifs en mosaïques sont caractéristiques de l'artiste. 

Agathon, VIT-REAU, 2015
(source : François Frémeau, 
licence CC BY-SA 4.0)
Du corail évoquant la mosaïque grecque, nous passons aux poissons aux reflets jaunes. 

Agathon, VIT-REAU, 2015
(source : François Frémeau, 
licence CC BY-SA 4.0)

Agathon, VIT-REAU, 2015
(source : François Frémeau, 
licence CC BY-SA 4.0)
Puis nous terminons dans la flore maritime. Sol, faune, flore, un parcours en trois dimensions à travers la mer. L'argument de l'artiste inscrit sur le cartel tient en peu de mots : "Pour elle, pour lui, pour nous ... pour l'eau". Toujours est-il que ce genre d'oeuvres contemporaines dans l'espace public change du sempiternel street-art dévoyé par une sur-sollicitation du pouvoir politique qui cherche à être original en étant finalement très convenu. Une autre forme donc que le graffiti urbain (qui est parfois très réussi) qui correspond bien à ce petit mur menant à la piscine Château-Landon et qui est accessible à tous gratuitement.

VIT-REAU d'Agathon
Piscine Château-Landon
31 rue du Château-Landon
75010 PARIS

lundi 29 août 2016

"Rester vivant" de Michel Houellebecq

Une chose m'attire particulièrement dans l'oeuvre de Michel Houellebecq, c'est le regard qu'il porte sur le monde. Regard cru, désabusé, neutre. L'exposition "Rester vivant" présentée au Palais de Tokyo nous propose de découvrir le Houellebecq photographe, dessinateur, mais toujours écrivain et poète, les mots étant omniprésents dans ses oeuvres. De nombreux artistes ont navigué entre plusieurs arts, et bien qu'on sente que l'écrivain ait souvent besoin des mots à l'intérieur de ses oeuvres, cette exposition (très inspirée de La possibilité d'une île et de La carte et le territoire) découpée en plusieurs salles thématiques est un condensé de l'oeuvre littéraire de Michel Houellebecq, . 

Dans une pièce au look années 70 meublées de canapés marrons et blancs, sur un petit meuble, est posé une télévision diffusant une ancienne interview de Michel Houellebecq où il livre peut-être la clef principale de son style. Adolescent, il aimait à se poser à un endroit et à garder les yeux absolument immobiles et ouverts. "Tout ce qui traversait mon chant de vision était vu par moi avec neutralité" dit-il, précisant que c'est ce qui peut le mieux caractériser son style. 

Michel HOUELLEBECQ, Mission #001
(source : François Frémeau, licence CC BY-SA 4.0)
Il y a bien sûr un romantisme nostalgique dans l'oeuvre de l'écrivain, dans ses romans, comme dans ses photographies. Parlant de l'écrivain Jean-Louis Curtis dans La carte et le territoire, il écrit : "Il y a une vraie nostalgie, une sensation de perte dans le passage de la France traditionnelle au monde moderne. [...] C'est bien à tort au fond qu'on a catalogué Jean-Louis Curtis comme réactionnaire, c'est juste un bon auteur un peu triste, persuadé que l'humanité ne peut gère changer, dans un sens comme dans l'autre." [1] On peut ici faire un parallèle avec la pensée de Houellebecq lui-même qui offre dans cet exposition comme dans ses livres un questionnement sur la politique de la Cité, la mort, le territoire, l'Homme, les passions, l'attachement. Pour Michel Houellebecq, faire des photos, c'est une manière d'ordonner le monde. 

Les parties les moins convaincantes sont la plupart des vidéos, trop courtes, pas assez bien intégrées à l'exposition. Une seule exception, le diaporama captivant et hypnotique de son chien Clément décédé et qui clos l'exposition dans un moment assez rare où on voit apparaître un autre Michel Houellebecq. Ces photos sont diffusées en superposition avec A machine for loving d'Iggy Pop sur un texte (traduit en anglais) provenant de La possibilité d'une île.



Quelques autres artistes sont invités, comme Robert Combas qui a mis notamment en peinture de nombreux poèmes de Houellebecq. Une explosion de couleur qui suit la salle dédiée au voyage et à l'optimisme.

Robert COMBAS, Michel Houellebecq et son chien (et ami) Clément, technique mixte sur papier marouflé sur toile, 2016
(source : François Frémeau, licence CC BY-SA 4.0)
Car "Rester vivant" n'est pas une exposition déprimante, morbide ou terne, mais bien au contraire un violent face à face avec notre monde, ce que nous en avons fait, que cela nous plaise ou non. Une vision crue, neutre, souvent touchante, entre l'Homme et le monde qu'il façonne dans ce nouvel âge de l'Anthropocène.

Michel HOUELLEBECQ, Espagne #015
(source : François Frémeau, licence CC BY-SA 4.0)

On pourrait finalement relier cette exposition à la citation de Neil Young dans Extension du domaine de la lutte :

"Good times are coming
I hear it everywhere I go
Good times are coming
But they're sure coming slow." [2]

Une très belle critique de l'exposition est proposée par Marc Michiels sur Le Mot et La Chose.



Rester vivant de Michel HOUELLEBECQ
Du 23 juin 2016 au 11 septembre 2016
Palais de Tokyo
13 avenue du Président Wilson
75116 Paris
De 8,40 € à 10,40 €
Mon avis : 5/5

***

[1] Michel HOUELLEBECQ, La carte et le territoire, Paris, Flammarion, 2010, pp. 164-165
[2] Michel HOUELLEBECQ, Extension du domaine de la lutte, Paris, Éditions Maurice Nadeau, 1994 , p. 26

dimanche 31 janvier 2016

"Solange et les vivants" d'Ina Mihalache

Il n'est plus besoin de présenter la chaîne YouTube de Solange te parle, personnage créé par Ina Mihalache autour d'abord d'un abécédaire poétique au rythme lent pour arriver à des chroniques culturelles où Ina prend de plus en plus le pas sur le personnage de Solange. 

Grâce à la collaboration financière de ses abonnés via la plateforme Ulule, Ina Mihalache a sorti hier son premier film : "Solange et les vivants". 




Projet au long cours, il pose la question du temps du cinéma face au temps du web. En effet, le film a mis deux ans à voir le jour, tandis que sur YouTube, Ina changeait progressivement de ton dans ses vidéos. Le premier résultat est un film en léger décalage avec le ton actuel des vidéos "Solange te parle", mais pourtant toujours autour de ce personnage.

(source : François Frémeau, licence CC BY-SA 2.0)
30 janvier 2016, rendez-vous en Solangie. Dans la rue, une file d'attente fournie et très lookée, devant le cinéma Le Luminor - Hôtel de Ville. C'est l'avant-première, Ina sera présente pour présenter le film et répondre à des questions en fin de séance. C'est une projection pour les fans ayant réservé en premier leurs places. Dans cette foule, cheveux jaunes, cheveux roses, cheveux verts, et une moyenne d'âge entre 18 et 20 ans, comme me le fait remarquer Antoine sur Twitter. 

 J'ai d'abord été très surpris par l'âge moyen de ce public. Certes, YouTube est une plateforme très utilisée par les jeunes, mais j'aurais cru le public de Solange plutôt autour des 25 ans. En y réfléchissant de plus près, j'étais heureux de penser que des gens si jeunes soient confrontés aux choix artistiques exigeants de Solange/Ina et que, peut-être, elle contribue à créer une nouvelle génération de personnes amoureuses de culture. 

(source : François Frémeau, licence CC BY-SA 2.0)
Sous la célèbre lampe ancienne qui orne d'habitude son appartement, Ina, visiblement très émue, a présenté son film, les tenants et aboutissants, le pourquoi, les inquiétudes. Au fil de la présentation, le ton devient plus naturel, et c'est très agréable d'avoir une artiste qui présente son oeuvre avant le visionnage. On rentre véritablement dans les problématiques qui l'ont habitée et qui l'habitent encore dans la conception et la réception de ce film.  


Une vidéo publiée par l'insolente (@suislinsolente) le

Passons au film, portrait d'Ina avant Solange, ou plutôt de Solange avant Solange. Par une suite de pastilles constituées d'autant de personnages qui marquent la vie de l'héroïne, on devine petit à petit des fragments de Solange qui vont s'assembler.

J'ai énormément apprécié la première partie du film, dédiée à une réflexion sur la solitude et le temps nécessaire à la création. Solange, seule dans son appartement, nous apprend à quel point il est agréable de décider de la totalité de sa journée. C'est une réflexion que je me faisais récemment en tant qu'artiste : comment le monde fait de notifications, de réseaux sociaux, de mails, de coups de téléphone, de SMS, de transports en commun, peut-il laisser de l'espace à la création ? Comment retrouver de la solitude et du calme nécessaires à la création dans un monde qui nous les interdit ? 

Les personnages se succèdent avec beaucoup de naturel, le montage bien réalisé. Connaissant les vidéos de Solange et les choix de spectacles et de films qu'elle nous présente chaque mois, j'avoue avoir été surpris par un certain classicisme dans la manière de faire le film. On est sur un format très normé, tant dans la manière de filmer (on note néanmoins qu'elle arrive à nous montrer des angles de vue sur son appartement que nous n'avions encore jamais vus dans ses vidéos) que dans la mise en scène. Peur d'aller trop loin dans un format "cinéma" ? Peur de ne pas trouver son public ? Pourtant, on peut parier que les milliers de personnes qui regardent ses vidéos n'auraient pas été choqués d'en retrouver le ton et la façon de filmer dans le long métrage. 

Le gros point faible pour moi aura été ... la musique. Peut-être est-ce un parti pris esthétique, mais on est accompagné par une mélodie peu élaborée au synthétiseur qui nous transporte tout droit dans un téléfilm des années 70. Je trouve que la poésie du film aurait été davantage portée avec une musique plus fine, plus élégante, peut-être avec des instruments acoustiques (je suppose là un problème de budget pour un film entièrement auto-produit). 

Alors, que penser de "Solange et les vivants" ? Film de fans ? Solange te parle étant un personnage public bien connu de YouTube, il y a certes de grosses attentes de la part de ses "fans" comme y fait allusion la dernière partie du film. En tout cas, premier travail prometteur si Solange arrive à lâcher un peu le ton pour se rapprocher davantage de ce qui se passe (tant visuellement que d'un point de vue sonore) dans ses vidéos YouTube. Un deuxième film a d'ailleurs été évoqué à mi-mots. En tout cas, le succès de ce premier film et les nombreuses réservations vont lui offrir une diffusion nationale en mars. 

Solange et les vivants d'Ina Mihalache
Durée : 68 minutes
Date de sortie : 9 mars 2016
Mon avis : 3/5

dimanche 18 octobre 2015

"Formes doubles" d'Alfred Vaasgsvold

(source : François Frémeau, licence CC BY-SA 3.0 FR)
Réalisée en 2009, formée de deux blocs de marbre, "Formes doubles" nous montre deux formes ondulées en marbre, posées sur une plaque de marbre et soutenu par un bloc de bois. Cette sculpture est comme un petit trésor caché dans une cour intérieure de la Maison de la Norvège à la Cité Universitaire de Paris. 

(source : François Frémeau, licence CC BY-SA 3.0 FR)
On ne trouve pas grand chose sur internet sur l'artiste norvégien Alfred Vaagsvold. Le site TGC Nordica reprend justement une interview de 2009 où il parle d'une exposition à la Maison de la Norvège à Paris où il a exposé des sculptures et des peintures. Il déclare : "Mes installations sont toutes des actions et des réactions liées à ce qui se passe dans la société. Les sculptures sont des études et de nouvelles créations de formes. Elles sont influencées par cette déclaration d'Hans Arp : ''Nous ne souhaitons pas imiter la nature, nous ne souhaitons pas reproduire, nous voulons produire ... Nous voulons produire directement, pas indirectement. Puisqu'il n'y a pas de trace d'abstraction dans cet art, nous l'appelons art concret''"

samedi 5 septembre 2015

"Everybody" de Stefan Sagmeister

"Ce n'est pas vraiment beau, [...] mais parfaitement en situation avec les immeubles modernes au loin et, plus largement, l'atmosphère du quartier." [1] Je suis assez d'accord avec ce commentaire d'un passant recueilli dans un article de La Croix concernant cette exposition d'oeuvres gonflables à La Villette à Paris. 

Grant HUTCHINSON, Stefan Sagmeister, 2008
(licence CC BY-NC-ND 2.0)
L'artiste autrichien Stefan Sagmeister est plus dans le domaine de l'humour que dans la provocation gonflable de McCarthy place Vendôme avec son désormais célèbre plug vert. Néanmoins, ses réalisations sont également gonflables, et depuis l'expérience parisienne de McCarthy, des gardes sont situés à côté de ces dernières, probablement pour éviter que des gens essayent de les dégonfler ou de les vandaliser. 

Stefan Sagmeister, Everybody, 2007
(source : François Frémeau, licence CC BY-SA 3.0 FR)
Le cartel de cette oeuvre nous indique que l'artiste est "une figure marquante du design et du graphisme de ce début de XXième siècle" [sic !] Il précise également que quatre singes en colère sont disséminés dans le parc de la Villette, portant chacun une partie du message : "Everybody always think that they are right." Je n'ai pas vraiment compris pourquoi des singes. Je n'ai pas vraiment compris qu'ils étaient en colère avant que le cartel ne me l'explique. En revanche, le côté chasse aux singes m'a amusé. 

Stefan Sagmeister, Everybody, 2007
(source : François Frémeau, licence CC BY-SA 3.0 FR)
Je suis donc parti explorer un parc que je côtoie depuis des années à la recherche de ces singes gonflables. Et j'ai eu l'occasion de découvrir cet espace immense, résolument contemporain, magnifiquement aménagé avec des centaines de petits coins semblables à des salons où on peut se poser pour lire, rêver, manger, etc...

Stefan Sagmeister, Everybody, 2007
(source : François Frémeau, licence CC BY-SA 3.0 FR)
Je n'ai pas trouvé le cinquième singe, mais ils auront au moins eu le mérite de me faire visiter ce parc très beau que je ne connaissais finalement pas. Pour l'oeuvre en elle-même, ce n'est pas parce qu'on utilise un procédé à la mode (les matériaux gonflables) qu'une oeuvre en devient "de facto" intéressante. Je trouve que ces singes n'ont pas grand chose à nous dire.

"L'Air des Géants"
Parc de la Villette, Paris
Jusqu'au 13 septembre
Tous les jours de 11h à 20h30
Entrée libre
Mon avis : 2/5
***

[1] Emmanuelle GIULIANI, "L'art en taille XXL" in La Croix, n° 40281, 5 et 6 septembre 2015, p. 22

mercredi 12 août 2015

Centre Pompidou : collection contemporaine

Profitant du fait que la collection permanente du Centre Pompidou me soit gratuite, je me suis rendu aujourd'hui dans ce musée que je n'avais encore jamais visité. N'étant pas habitué du musée, j'avoue que la première impression m'a été assez négative. On rentre dans cet immense hall de béton et on ne sait absolument pas où aller, ni pour acheter son ticket, ni une fois qu'on a acheté son ticket. J'étais intéressé par la collection contemporaine, mais j'ai dû passer par la collection moderne (où on voit de magnifiques Braque, Picasso, et autres) au 5e étage par lequel on accède par les fameux escalators (dont un était en panne). Monter au 5e pour redescendre au 4e n'est pas des plus pratique. Je pense que le musée devrait améliorer son accessibilité et l'explication des espaces au public. 

Georges BRAQUE, L'homme à la guitare, 1914
Passée cette première impression négative, j'ai été absolument séduit par le musée qui m'a fait penser au Palais de Tokyo par ses grands volumes. Des espaces très grands, pas de sens de visite obligé. On peut errer à sa convenance et s'arrêter devant des oeuvres qui nous interpellent. Exactement la façon dont j'aime visiter un musée. On ne sent pas contraint de s'arrêter devant chaque oeuvre. 

La population des visiteurs est très jeune, ce qui est une bonne nouvelle pour l'avenir de la culture. Enfin, le musée semble respecter la Charte Tous Photographes du Ministère de la Culture car on peut absolument prendre tout en photo alors que (par définition, puisqu'il s'agit d'art contemporain) toutes les oeuvres exposées sont soumises au droit d'auteur. Le Musée du Louvre pourrait s'en inspirer qui interdit les photographies dans ses expositions temporaires. 

Je me suis vite rendu dans la collection contemporaine qui m'intéressait le plus. Ce que j'ai aimé, c'est la grande diversité des matériaux, supports, moyens qu'utilisent les artistes pour s'exprimer, à l'instar de Christian MARCLAY avec Telephones (1995), une compilation de vidéos projetée sur un mur. 



Étant musicien, je suis très sensible aux artistes qui utilisent le son dans leurs oeuvres. Un travail qui m'a marqué est celui du Label Dalbin qui associe le travail visuel d'un plasticien à celui d'un compositeur, les deux étant créateurs à part égale. Dans The Five Elements (2005), je suis tombé sur Air de François CHALET et SEELENLUFF qui m'a vraiment accroché. Le travail entre l'image et le son est juste magnifique. Ces films sont diffusés dans des salles noires et isolées par des murs de passage ce qui permet de ne pas troubler la visite pour les autres oeuvres. 



Au-delà des oeuvres en format film, ce crucifix de Kendell GEERS emballé dans un papier de barrière  rouge et blanc m'a fait pensé au Piss Christ d'Andress SERRANO. 

Kendell GEERS, T.W. (I.N.R.I.), 1994
L'une des oeuvres qui m'a le plus bouleversé est une pièce dans laquelle on trouve des étagères remplies d'objets sans lien apparent. Végétaux, pierres, iPod, statues, verres. On se croirait sur un chantier archéologique de l'an 50000 où des archéologues essaieraient de redonner du sens à des objets qu'il retrouvent. La pièce est baignée par des sons de sirènes stridentes et de tôle ondulée. 

Andriàn VILLAR ROJAS, Sans titre (étagères), I, de la série : Today We Reboot the Planet, 2013
Le titre de la série Today We Reboot the Planet me semble pertinent dans ce début de XXIe siècle marqué par la destruction continue de notre environnement. L'artiste semble se positionner en proposant un nouveau départ à notre planète où chaque époque (passé, présent et futur) repartirait de zéro. 

Une autre oeuvre étonnante, cette salle capitonnée et silencieuse dans laquelle se trouve un piano (fermé), un thermomètre et un tableau. On y rentre en se penchant car l'ouverture est assez petite. On a l'impression d'être sorti du musée, dans un temps suspendu. 

Joseph BEUYS, Plight, 1985
Des installations, des photos, des lumières, des films, des sonores, des peintures, des meubles, de l'architecture, des ustensiles ... Cette partie "Collection contemporaine" est vraiment très complète, très intéressante, et on prend un plaisir fou à s'y perdre et à se plonger dans les oeuvres. Mon seul regret, qu'il n'y ait pas plus d'oeuvres d'après 2000. Mais j'imagine que le musée fait tourner ses collections et achète régulièrement des oeuvres qui viennent d'être créées. Comme on peut s'y attendre, j'ai été le plus marqué par les oeuvres utilisant le thème de la musique ou du son, mais il y en a beaucoup d'autres à découvrir.