dimanche 18 octobre 2015

"Formes doubles" d'Alfred Vaasgsvold

(source : François Frémeau, licence CC BY-SA 3.0 FR)
Réalisée en 2009, formée de deux blocs de marbre, "Formes doubles" nous montre deux formes ondulées en marbre, posées sur une plaque de marbre et soutenu par un bloc de bois. Cette sculpture est comme un petit trésor caché dans une cour intérieure de la Maison de la Norvège à la Cité Universitaire de Paris. 

(source : François Frémeau, licence CC BY-SA 3.0 FR)
On ne trouve pas grand chose sur internet sur l'artiste norvégien Alfred Vaagsvold. Le site TGC Nordica reprend justement une interview de 2009 où il parle d'une exposition à la Maison de la Norvège à Paris où il a exposé des sculptures et des peintures. Il déclare : "Mes installations sont toutes des actions et des réactions liées à ce qui se passe dans la société. Les sculptures sont des études et de nouvelles créations de formes. Elles sont influencées par cette déclaration d'Hans Arp : ''Nous ne souhaitons pas imiter la nature, nous ne souhaitons pas reproduire, nous voulons produire ... Nous voulons produire directement, pas indirectement. Puisqu'il n'y a pas de trace d'abstraction dans cet art, nous l'appelons art concret''"

samedi 5 septembre 2015

"Everybody" de Stefan Sagmeister

"Ce n'est pas vraiment beau, [...] mais parfaitement en situation avec les immeubles modernes au loin et, plus largement, l'atmosphère du quartier." [1] Je suis assez d'accord avec ce commentaire d'un passant recueilli dans un article de La Croix concernant cette exposition d'oeuvres gonflables à La Villette à Paris. 

Grant HUTCHINSON, Stefan Sagmeister, 2008
(licence CC BY-NC-ND 2.0)
L'artiste autrichien Stefan Sagmeister est plus dans le domaine de l'humour que dans la provocation gonflable de McCarthy place Vendôme avec son désormais célèbre plug vert. Néanmoins, ses réalisations sont également gonflables, et depuis l'expérience parisienne de McCarthy, des gardes sont situés à côté de ces dernières, probablement pour éviter que des gens essayent de les dégonfler ou de les vandaliser. 

Stefan Sagmeister, Everybody, 2007
(source : François Frémeau, licence CC BY-SA 3.0 FR)
Le cartel de cette oeuvre nous indique que l'artiste est "une figure marquante du design et du graphisme de ce début de XXième siècle" [sic !] Il précise également que quatre singes en colère sont disséminés dans le parc de la Villette, portant chacun une partie du message : "Everybody always think that they are right." Je n'ai pas vraiment compris pourquoi des singes. Je n'ai pas vraiment compris qu'ils étaient en colère avant que le cartel ne me l'explique. En revanche, le côté chasse aux singes m'a amusé. 

Stefan Sagmeister, Everybody, 2007
(source : François Frémeau, licence CC BY-SA 3.0 FR)
Je suis donc parti explorer un parc que je côtoie depuis des années à la recherche de ces singes gonflables. Et j'ai eu l'occasion de découvrir cet espace immense, résolument contemporain, magnifiquement aménagé avec des centaines de petits coins semblables à des salons où on peut se poser pour lire, rêver, manger, etc...

Stefan Sagmeister, Everybody, 2007
(source : François Frémeau, licence CC BY-SA 3.0 FR)
Je n'ai pas trouvé le cinquième singe, mais ils auront au moins eu le mérite de me faire visiter ce parc très beau que je ne connaissais finalement pas. Pour l'oeuvre en elle-même, ce n'est pas parce qu'on utilise un procédé à la mode (les matériaux gonflables) qu'une oeuvre en devient "de facto" intéressante. Je trouve que ces singes n'ont pas grand chose à nous dire.

"L'Air des Géants"
Parc de la Villette, Paris
Jusqu'au 13 septembre
Tous les jours de 11h à 20h30
Entrée libre
Mon avis : 2/5
***

[1] Emmanuelle GIULIANI, "L'art en taille XXL" in La Croix, n° 40281, 5 et 6 septembre 2015, p. 22

mercredi 12 août 2015

Centre Pompidou : collection contemporaine

Profitant du fait que la collection permanente du Centre Pompidou me soit gratuite, je me suis rendu aujourd'hui dans ce musée que je n'avais encore jamais visité. N'étant pas habitué du musée, j'avoue que la première impression m'a été assez négative. On rentre dans cet immense hall de béton et on ne sait absolument pas où aller, ni pour acheter son ticket, ni une fois qu'on a acheté son ticket. J'étais intéressé par la collection contemporaine, mais j'ai dû passer par la collection moderne (où on voit de magnifiques Braque, Picasso, et autres) au 5e étage par lequel on accède par les fameux escalators (dont un était en panne). Monter au 5e pour redescendre au 4e n'est pas des plus pratique. Je pense que le musée devrait améliorer son accessibilité et l'explication des espaces au public. 

Georges BRAQUE, L'homme à la guitare, 1914
Passée cette première impression négative, j'ai été absolument séduit par le musée qui m'a fait penser au Palais de Tokyo par ses grands volumes. Des espaces très grands, pas de sens de visite obligé. On peut errer à sa convenance et s'arrêter devant des oeuvres qui nous interpellent. Exactement la façon dont j'aime visiter un musée. On ne sent pas contraint de s'arrêter devant chaque oeuvre. 

La population des visiteurs est très jeune, ce qui est une bonne nouvelle pour l'avenir de la culture. Enfin, le musée semble respecter la Charte Tous Photographes du Ministère de la Culture car on peut absolument prendre tout en photo alors que (par définition, puisqu'il s'agit d'art contemporain) toutes les oeuvres exposées sont soumises au droit d'auteur. Le Musée du Louvre pourrait s'en inspirer qui interdit les photographies dans ses expositions temporaires. 

Je me suis vite rendu dans la collection contemporaine qui m'intéressait le plus. Ce que j'ai aimé, c'est la grande diversité des matériaux, supports, moyens qu'utilisent les artistes pour s'exprimer, à l'instar de Christian MARCLAY avec Telephones (1995), une compilation de vidéos projetée sur un mur. 



Étant musicien, je suis très sensible aux artistes qui utilisent le son dans leurs oeuvres. Un travail qui m'a marqué est celui du Label Dalbin qui associe le travail visuel d'un plasticien à celui d'un compositeur, les deux étant créateurs à part égale. Dans The Five Elements (2005), je suis tombé sur Air de François CHALET et SEELENLUFF qui m'a vraiment accroché. Le travail entre l'image et le son est juste magnifique. Ces films sont diffusés dans des salles noires et isolées par des murs de passage ce qui permet de ne pas troubler la visite pour les autres oeuvres. 



Au-delà des oeuvres en format film, ce crucifix de Kendell GEERS emballé dans un papier de barrière  rouge et blanc m'a fait pensé au Piss Christ d'Andress SERRANO. 

Kendell GEERS, T.W. (I.N.R.I.), 1994
L'une des oeuvres qui m'a le plus bouleversé est une pièce dans laquelle on trouve des étagères remplies d'objets sans lien apparent. Végétaux, pierres, iPod, statues, verres. On se croirait sur un chantier archéologique de l'an 50000 où des archéologues essaieraient de redonner du sens à des objets qu'il retrouvent. La pièce est baignée par des sons de sirènes stridentes et de tôle ondulée. 

Andriàn VILLAR ROJAS, Sans titre (étagères), I, de la série : Today We Reboot the Planet, 2013
Le titre de la série Today We Reboot the Planet me semble pertinent dans ce début de XXIe siècle marqué par la destruction continue de notre environnement. L'artiste semble se positionner en proposant un nouveau départ à notre planète où chaque époque (passé, présent et futur) repartirait de zéro. 

Une autre oeuvre étonnante, cette salle capitonnée et silencieuse dans laquelle se trouve un piano (fermé), un thermomètre et un tableau. On y rentre en se penchant car l'ouverture est assez petite. On a l'impression d'être sorti du musée, dans un temps suspendu. 

Joseph BEUYS, Plight, 1985
Des installations, des photos, des lumières, des films, des sonores, des peintures, des meubles, de l'architecture, des ustensiles ... Cette partie "Collection contemporaine" est vraiment très complète, très intéressante, et on prend un plaisir fou à s'y perdre et à se plonger dans les oeuvres. Mon seul regret, qu'il n'y ait pas plus d'oeuvres d'après 2000. Mais j'imagine que le musée fait tourner ses collections et achète régulièrement des oeuvres qui viennent d'être créées. Comme on peut s'y attendre, j'ai été le plus marqué par les oeuvres utilisant le thème de la musique ou du son, mais il y en a beaucoup d'autres à découvrir.  

lundi 16 mars 2015

Sculpture anonyme dans le Parc des Coquibus à Évry

Pour l'instant, sur Antidilettante, nous avons parlé architecture, cinéma, photographie, dessin, musique, il était temps de parler de sculpture. En me promenant ce matin dans le Parc des Coquibus à Évry (Essonne), je suis tombé sur une sculpture étonnante en métal et pierre à côté du mémorial départemental de la guerre d'Algérie et des combats du Maroc et de la Tunisie. 

(source : François Frémeau, licence CC BY-SA 3.0)
Cette sculpture n'a aucune plaque signalant son titre ni son auteur. Le photographe Olivier Perrin du blog "Evry Daily Photo" l'a prise en photo (de nuit et scénographiée) et vous pouvez la voir sur ce lien. Il semble également ignorer le nom et l'auteur de la sculpture. J'ai donc ajouté ma photo sur la page Google du Parc des Coquibus en espérant que quelqu'un pourra me renseigner sur l'origine de cette sculpture. 


J'ai posé la question à la ville d'Évry et à la communauté d'agglomération sur Twitter, mais je n'ai pas encore de réponse. Il y a en tout cas un concept intéressant : même au XXIe siècle, on peut ignorer tout d'une oeuvre d'art contemporaine (aucun renseignement ne peut être trouvé sur internet). Il n'y a pas besoin de remonter bien loin dans le temps pour trouver des petits mystères culturels à résoudre. Si jamais le sculpteur ou une autre personne tombe sur ce billet de blog et peut me renseigner sur l'auteur et le titre de la sculpture, ce sera éventuellement l'occasion d'inciter la ville à faire poser une plaque informative à côté de la sculpture. 

Ce mystère de 2015 sera-t-il levé avant la fin de l'année ?

Mise à jour du 18 mars 2015 :


Voilà un cas que je ne connaissais pas. L'artiste pourrait s'être opposé à la mention de son nom sur l'oeuvre. Par ailleurs, @Bestlaf sur twitter a les informations suivantes : "A ma connaissance, il s'agit d'une oeuvre saluant le jumelage d'Evry avec la ville d'Esteli, au Nicaragua. La flèche en indiquerait la direction, et la pyramide évoque évidemment les cultures méso-américaine. La "place" toute proche dans le parc se nomme d'ailleurs Place d'Esteli. Je ne connais cependant ni son éventuel nom ni celui de son auteur."

L'enquête continue !


mercredi 4 février 2015

Première soirée à la Philharmonie de Paris avec l'Ensemble Intercontemporain

Il aura fallu la construction de cette nouvelle salle pour que j'achète ma première place de concert en 10 ans ! Non pas que je n'aille pas au concert, mais j'ai toujours eu des invitations étant donné que je suis musicien. En voyant la foule immense qui venait écouter du Boulez et du Varèse ce soir là, on peut penser que l'effet de nouveauté a été prédominant chez de nombreux autres auditeurs. Il faut dire qu'elle me nargue chaque matin, cette Philharmonie de Paris, que je vois s'assembler morceau par morceau depuis un an tandis que je vais au conservatoire de Paris situé juste en face. 

La Philharmonie de Paris le 3 février 2015
(source : François Frémeau, licence CC BY-SA 3.0
2 400 personnes se sont donc pressées dans le XIXe arrondissement de Paris pour venir écouter l'Orchestre Intercontemporain et l'Orchestre du conservatoire de Paris dans un programme où j'ai vu la Salle Pleyel autrefois remplie d'à peine 100 personnes. Voilà qui contrera l'argument de ceux qui disaient que le public ne se déplacerait pas dans l'Est parisien. 

Lorsqu'on approche de ce bâtiment, on le trouve tour à tour immense, relativement modeste en taille, puis complètement démesuré. C'est clairement un geste architectural fort en ce début de XXIe siècle pour la ville de Paris. 

Détail du bâtiment de Jean Nouvel
(source : François Frémeau, licence CC BY-SA 3.0
Pour monter symboliquement vers la culture, on peut au choix emprunter un grand escalier, un chemin ou un escalator. C'est ce dernier choix que je fais, ne voyant pas encore bien les autres accès possibles dans le noir. Et là, la magie du bâtiment vers lequel on se dirige depuis plusieurs minutes où l'on remonte l'Allée du Zénith disparaît aussitôt. Draps tendus pour cacher le chantier, barrières vertes et grises de la ville de Paris pour bloquer l'accès aux travaux en cours, ambiance de parking souterrain avec fils qui pendent. Dommage de perdre cette magie d'aller au concert en passant par ce sas sans vie. Puis, nous arrivons dans le hall qui est un peu plus abouti. 

Les sols sont en pente, les plafonds (auquel sont suspendues de petites lamelles noires) sont ondulants ce qui donne l'impression d'être dans un vaisseau spatial, dans un navire, ou dans une dimension où, à l'instar de cette partie centrale molle et brillante du bâtiment qui semble de replier sur elle même, les formes sont mouvantes. L'impression générale est très agréable. 

Un personnel nombreux dirige la foule un peu perdue. J'ai un peu peur quand j'entends qu'il faut se rendre au sixième étage pour accéder au deuxième balcon, puis je réalise que ce hall où je me trouve est déjà au troisième étage du bâtiment. Dans les couloirs, trous au plafond, fils apparents, trous de prises électriques non installées. Pour rentrer sur le balcon, modules de construction posés sur les côtés. Bref, le chantier est loin d'être fini et on a l'impression d'un bâtiment déjà abîmé avant d'avoir démarré à cause de tous ces éléments manquants. 



L'intérieur de la grande salle de la Philharmonie de Paris
(source : François Frémeau, licence CC BY-SA 3.0
C'est alors qu'on rentre dans la grande salle de la Philharmonie de Paris. Et là, le sentiment est tout à fait magique. Les balcons flottent littéralement dans le vide ce qui peut donner une sensation de vertige au premier abord, d'autant que les sièges descendent à pic. L'avantage de cette pente raide est que chaque rang est placé très haut par rapport au précédent ce qui permet d'avoir une visibilité parfaite sans être gêné par les têtes. On a donc l'impression d'être dans des modules qui flottent dans l'air.

La première surprise acoustique est arrivée au moment où les musiciens arrivent un par un sur scène et commencent à s'échauffer ou à répéter leurs traits. Soudain, j'entends un son de trombone qui provient de derrière moi. Instinctivement je me retourne et je n'arrive pas à trouver d'où vient le son avant de voir le tromboniste à droite sur scène. Ce qui est admirablement réalisé c'est que les sons qui proviennent des instruments situés visuellement à gauche nous proviennent depuis la scène, mais également depuis la gauche derrière notre tête (c'est l'avantage de ces balcons flottants et des nuages harmoniques situés au plafond). 

L'Ensemble Intercontemporain sur scène
(source : François Frémeau, licence CC BY-SA 3.0

Puis l'Ensemble Intercontemporain démarre le concert. Au programme, Pli selon pli (Portrait de Mallarmé), pour soprano et orchestre, de Pierre Boulez. L'acoustique permet à la fois d'entendre précisément aussi bien un roulement de cymbale et trois harpes jouant pianissimo que le son global de l'orchestre. C'est précisément cette impossible équation entre détail et globalité que beaucoup de salle échouent à avoir. On est au départ un peu dérouté par le son stéréophonique qui résonne de tout autour de nous comme s'il provenait de baffles, mais on s'y habitue très vite. Cette sensation d'être entouré par le son nous fait totalement rentrer dans l'oeuvre musicale comme si on était assis au milieu de l'orchestre. La salle reste relativement éclairée durant le concert ce qui, soyons honnête, limite l'envie de dormir qu'on peut avoir dans d'autres salles très noires durant les représentations.

Quelques défauts acoustiques (l'acoustique de la salle est toujours en cours d'élaboration) s'il faut en nommer : les vents manquent de précision d'attaque quand celle des cordes et percussions est admirablement restituée et la salle ne marche pas très bien pour la voix. Il faut dire qu'elle est conçue pour l'orchestre. Mais dans un programme comme celui d'hier soir où l'on donne une oeuvre pour voix et orchestre, on reste un peu sur sa faim.

Soyons clairs, l'interprétation de Marisol Montalvo de l'oeuvre de Boulez est absolument magistrale. Le public ne s'y trompe pas qui la rappelle plusieurs fois sur scène. Mais depuis le deuxième balcon (il faudra que je teste différentes places) on l'entend clairement quand elle se tourne vers nous, mais dès qu'elle chante vers l'autre côté de la salle, le son de la voix paraît très distant par rapport à celui de l'orchestre. Peut-être l'ultime limite des nuages acoustique : un chanteur bouge quand il chante contrairement à un musicien qui joue depuis une place statique. Le renvoi du son de la voix est donc plus difficile, particulièrement dans une salle en forme d'arène. 

Malgré ce petit détail, la version dirigée ce soir par Matthias Pintscher est à la hauteur de la salle et on ne peut s'empêcher de penser que Pierre Boulez fut l'initiateur de l'Ensemble Intercontemporain et de la Cité de la Musique (ancêtre de la Philharmonie de Paris). Une sorte d'hommage indirect pour cette soirée. Le livret (en simple papier mais fort de 26 pages) est un outil didactique extrêmement bien réalisé avec notamment des analyses et des explications très pertinentes sur les oeuvres qui aident le public à comprendre la musique. 

L'Ensemble Intercontemporain et l'Orchestre du conservatoire de Paris
(source : François Frémeau, licence CC BY-SA 3.0
La deuxième partie du concert nous donne à entendre Amériques d'Edgar Varèse. L'un des premier gestes orchestral fort qui fait rentrer le XXe siècle dans le monde moderne, l'oeuvre de 1918 remaniée en 1929 est le premier opus "officiel" du compositeur qui a détruit toutes ses oeuvres précédentes. C'est finalement déjà une oeuvre de musique ancienne en 2015 et elle me permet d'entendre un orchestre symphonique plus traditionnel résonner dans cette grande salle, l'Orchestre du conservatoire de Paris venant jouer aux côtés de l'Ensemble Intercontemporain. Et l'impression de départ est confirmée. Je crois réellement que la Philharmonie de Paris a la meilleure acoustique du monde. Je n'ai de ma vie, ni ailleurs en Europe ni dans des salles américaines, entendu pareille acoustique au service de l'orchestre qui est ici magnifié. 

Cette expérience inouïe, au sens propre, m'a été rendue possible pour la somme de 5 €. L'accès à la musique dans une salle extraordinaire pour un prix inférieur à celui d'une place de cinéma. Si la Philharmonie de Paris continue cette politique tarifaire sur le long terme, c'est la garantie d'un nouvel élan fort pour la musique dite "classique" quand on voit que 2 400 parisiens sont venus écouter de la musique contemporaine ce soir. À noter également que de très nombreux concerts de la Philharmonie de Paris sont retransmis en direct et gratuitement sur internet pour ceux qui n'habitent pas la capitale. Le bilan ne peut être que positif. Après ce premier concert, je n'ai qu'une envie : retourner écouter des concerts à la Philharmonie le plus souvent possible. 

lundi 12 janvier 2015

"Je Suis Charlie" de Les Cartons

Si vous avez une connexion internet, vous connaissez forcément Les Cartons. Il s'agit de l'oeuvre d'un artiste français dont on ne sait pas grand chose, mais qui, avec des mots décapants sur fond sobre nous gratifie régulièrement de blagues dont les sujets variés (sexe, art, société) jouent toujours avec la langue française.

LES CARTONS, L'orgasme est une performance artistique, 2014
Réalisés en format carré, ce format Instagram qu'on retrouve dans le magnifique film Mommy de Xavier Dolan ou dans la photographie de François Hollande par Raymond Depardon, format qui caractérise la représentation visuelle de ce début de XXIe siècle, Les Cartons sont souvent déclinés en séries thématiques, comme ici sur les stations de métro parisien.

LES CARTONS, Enlève ton slip Cité un homme, 2014
Parfois, c'est le savoureux décalage ou le parallèle historique ou artistique qui nous interpelle, comme cet "hommage" à Valérie Trierweiler.

LES CARTONS, Merci pour ce moment !, 2014
Et puis, il y a eu les attentats que nous avons connu cette semaine. Et l'auteur anonyme de ces Cartons a trouvé la manière simple, appropriée et frappante de réagir en utilisant La Liberté guidant le peuple de Delacroix.

Eugène DELACROIX, La Liberté guidant le peuple, 1830
Dans une image sobre regroupant le fameux hashtag (#) ou mot-dièse qui caractérise notre époque, et cette image que nous connaissons tous et qui nous rappelle que ces combats pour la liberté sont anciens, Les Cartons réussit la synthèse de ce qui s'est joué ces derniers jours : une tentative désespérée des terroristes d'en finir avec la République et avec la Liberté. 

LES CARTONS, Je suis Charlie, 2015
Trouver la manière adaptée, respectueuse, mais engagée, de s'exprimer artistiquement en ce genre de moments n'est pas facile. Voici quelques Cartons publiés depuis.

LES CARTONS, Ceci est un carton politiquement correct., 2015
LES CARTONS, -, 2015
LES CARTONS, L'art n'est pas pour te plaire, 2015
À mon avis, Les Cartons mériteraient un livre, ou une exposition quelque part, tant ils interrogent avec pertinence (et c'est le rôle de l'art) notre société contemporaine. 

Mon avis : 5/5

jeudi 1 janvier 2015

"Saint Sébastien, le corps triomphant" de Robin

La figure de Saint Sébastien a été traitée à nombreuses reprises à travers l'histoire de l'art. On a pu en voir un très bel exemple par le peintre italien du XVIIe siècle Antonio de Bellis, exposé lors de l'exposition "Sade. Attaquer le soleil" au Musée d'Orsay à Paris. 

Antonio de BELLIS, Saint Sébastien évanoui, 1630-1640
(source : domaine public, via Wikimedia Commons)
On représente traditionnellement ce saint dans la posture où il trouva la mort : attaché à un poteau et le corps transpercé de flèches. À partir du milieu du XIXe siècle, Saint Sébastien devient une iconographie homosexuelle, que ce soit en peinture, ou dans la photographie, comme dans ce Saint Sébastien de Fred Holland Day.

Fred Holland DAY, Saint Sebastian, 1906
(source : domaine public, via Wikimedia Commons)
L'exposition dont nous allons parler a été organisée par la mairie du 10e arrondissement de Paris et se tient jusqu'au 10 janvier. Elle a l'avantage d'être gratuite. Elle est réalisée par le photographe Robin, connu pour photographier le monde de la musique pop. Voici ce que nous dit l'artiste de son travail dans le texte de présentation de l'exposition : "Saint Sébastien se trouve naturellement être l'un des personnages les plus emblématiques pour sensibiliser le regard au corps. [...] Sujet profane et sacré à la fois, saint Sébastien mêle la fragilité à la beauté du corps, capable de résister aux pires atteintes. Or les fléaux les plus divers continuent de hanter notre quotidien. Peste hier ou sida aujourd'hui [...]. " Qu'en est-il de cette exposition ? 

L'exposition "Saint Sébastien, le corps triomphant" de Robin à la Mairie du 10e arrondissement de Paris
(source : François Frémeau, licence CC BY-SA 3.0 FR)
Située dans le hall de la mairie du 10e arrondissement de Paris, l'exposition qui compte une trentaine de photographies est inégale en qualité. Tout d'abord, l'éclairage rendant les photographies brillantes (d'autant qu'une partie est recouverte d'une vitre) rend la visibilité parfois difficile. Comme le dit très justement le texte d'introduction, la figure de Saint Sébastien, par son histoire religieuse et son appropriation par la communauté gay est à la fois un sujet religieux et profane. Or ici, nous passons "d'à la fois" à "alternativement". Certaines photographies sont magnifiques, notamment les comparaisons avec des photographies de statues représentant le saint. 


 L'exposition "Saint Sébastien, le corps triomphant" de Robin à la Mairie du 10e arrondissement de Paris
(source : François Frémeau, licence CC BY-SA 3.0 FR)
D'autres fois, l'image va être extrêmement banale et homoérotisée à outrance. Même si le photographe fait le choix de ne pas systématiquement représenter le saint avec des plaies évoquant les flèches pour faire un parallèle avec le sida, maladie invisible, certaines photographies feraient certes de très belles couvertures de magasine, mais sont tout à fait à côté du sujet (mais pas à côté du titre de l'exposition, car alors c'est le corps qui triomphe, et non la figure de saint Sébastien). Là où il est le plus pertinent, c'est finalement quand Robin s'appuie sur l'iconographie qui l'a précédée et qu'il se la réappproprie avec la photographie. Le parallèle est intéressant. 

Je ne suis pas spécialiste de la photographie contemporaine, mais voici mon avis sur cet exposition. Si vous voulez vous faire le vôtre, rendez-vous à la mairie du 10e arrondissement avant le 10 janvier 2015. 

Saint Sébastien, le corps triomphant de ROBIN
Du 1er décembre 2014 au 10 janvier 2015
Mairie du 10e arrondissement de Paris
72 rue du Faubourg Saint-Martin
Entrée libre
Mon avis : 2/5